Chroniques 2

 

 

SOURCE D’INSPIRATION :  CÔTES PICARDES ET D’OPALE

 

L’artiste a besoin de lieux pour se ressourcer, chercher une certaine lumière qu’il ne trouvera nulle part ailleurs, ou chercher des sources d’inspiration authentiques, bref des lieux aux antipodes de son atelier. Pour les fauvistes ce fut les bords de la Méditerranée, de Collioure à Menton, pour les Impressionnistes Le Havre et la vallée de la Seine, pour l’école de Barbizon la forêt de Fontainebleau, pour moi, ce fut cet enchaînement de ces trois baies, jumelles et pourtant si différentes les unes des autres, celle de la Somme, de l’Authie et de La Canche et cette zone de contact avec La Manche appelée côte picarde et côte d’Opale. Certes, je ne suis pas le premier, Alfred Manessier a fait connaître la baie de Somme, des écoles de peintures se sont développées à Berck et Etaples avec l’avènement du chemin de fer et des premières stations balnéaires.

Pour moi, terrien, vivant en Pays de Bray, à l’intérieur des terres, ce fut une révélation tardive. Il fallut d’abord découvrir et apprivoiser ce territoire entre Ault et Etaples. Mon premier contact fut à Ault durant une tempête où le vent soufflait à plus de 100 km/h. Les vagues claquaient contre la jetée, les bourrasques faisaient voler les paquets d’écume qui envahissaient la rue principale et puis ce moment unique où tout est redevenu calme, baigné par une lumière dorée : un moment magique. Il y eut un peu plus tard, les longues plages de sable fin entre Berk et l’estuaire de l’Authie bordée de pins et de dunes, Cayeux et sa longue jetée de cailloux avec le Hable d’Ault, la baie de Somme traversée maintes fois avec le spectacle tout aussi magique de la transhumance des moutons et enfin la découverte des phoques arrivant en masse pour s’installer sur des reposoirs au bout de la jetée de Berk. Le décor était posé. L’artiste pouvait entrer en jeu habité désormais par ce territoire et ses villages comme Le Crotoy, saint Valéry sur Somme, Quend, Fort Mahon ou Cayeux. Mais ce territoire c’est aussi des hommes et des femmes, qui y travaillent ou qui viennent en villégiature.

L’habitude est désormais prise depuis quatre ans, au début avril, juste avant Le Festival de l’Oiseau et de la Nature, je m’installe au Local à chaluts, rue Eudel, la rue qui monte à l’église juste à côté de l’espace Toulouse Lautrec pour une semaine d’exposition. Cet endroit a conservé une âme, comme si les murs conservaient encore en partie l’histoire de ces pêcheurs, de leur dur labeur, du matériel stocké dans cet ancien garage à bateau et filets de pêche. Le lieu est resté rustique, authentique, bref avec ses murs de brique peints en noir et blanc, ses pavés au sol et ses poutres apparentes il raconte une histoire qui correspond bien à mon travail.

Quatre années d’exposition, quatre thématiques différentes même s’il est difficile de sortir de la quadrature, mer, oiseau, nature, paysage. Les premiers amoureux de la photo animalière sont déjà là, parfois de retour d’affut commencé dès quatre heures du matin de même que les randonneurs, les chaussures de marche encore pleines de sable pour qui il n’y a pas de saison sans parler des familles en week-end.

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Dès 2022, j’avais vu grand, très grand, mon exposition s’intitulait « Océan » certainement encore marqué par le déferlement des vagues à Ault et les falaises qu’on y voit. Mais le Crotoy, ce n’est plus le territoire des falaises, de ces grands murs de calcaire blanc, qui parfois s’écroulent avec fracas sous l’action des vagues. Le Crotoy, c’est la platitude des paysages changeants jamais les mêmes de la baie de Somme.

 

Falaises 4

40X40 cm

tuile/zinc/ardoise

2020

 En 2023, peut-être inspiré par le titre du festival de l’oiseau et de la nature, mon exposition s’intitulait « De Natura », au sujet de la nature. J’avais trouvé amusant de mettre en titre en latin avec une référence à Virgile. En même temps, De Natura était compréhensible de tous sans avoir besoin d’avoir étudié Les Lettes latines. Je me suis intéressé aux paysages de la baie de Somme avec des techniques de collage de lichen et de peinture sur des gouttières de zinc.  J’ai pu également avec cette thématique élargir mon exposition, aux arbres, aux animaux car que serait une exposition en ce lieu sans goélands et phoques, et même de façon très osée à un champ de lavande de Provence.

 

Moutons dans les prés salés

25X25 cm

lichen/zinc/ardoise

2023

Moutons dans les prés salés en baie de Somme

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Ces deux premières années m’ont permis, pour me détendre le matin et le soir avant et après l’exposition, d’arpenter l’estran, cette zone de terre dégagée à marée basse. Il s’y passe toujours quelque chose, aussi bien en lien avec la nature, marée haute, marée basse, coucher ou lever de soleil idéal pour rendre l’heure dorée ou l’heure bleue chéries des photographes qu’en lien avec l’activité humaine ; promeneurs, cavaliers, baigneurs, pratiquants de chars à voile. Assis au pied des dunes, j’avais l’impression d’être au théâtre. L’exposition en 2024 s’est intitulé » « Entre ciel et mer » et a repris à travers huit tableaux le thème de l’estran traité sous un format panoramique.

 

Estran : les palle-planche

50X18 cm

bois/zinc/ardoise

2024

Pour 2025, je présente une exposition qui répond à celle de 2024, intitulée « Entre ciel et terre ». Outre la mer, l’estran j’ai voulu parler de ce qu’il y a derrière les dunes, du marais du Crotoy et qui se prolonge jusqu’au parc ornithologique de Marquenterre, de ces paysages à la Turner au coucher du soleil irisés de lumière, de ses bandes de couleurs, vertes, jaunes paille, bleu gris ou plus foncé qui font penser aux toiles de Rotkho, mais avec des tons plus doux, réalisés avec des chutes de céramique. Je présente également des nouveautés réalisées en 2024 et 2025 notamment une série de portraits en plan serrés ou très serrés façon photographie. Un de ces portraits représente un marin pêcheur tel qu’on les voyait au Crotoy avant que la flotte ne parte au Tréport. L’affiche évoque elle, le mouillage dans le port de plaisance à l’heure bleue, une référence au célèbre parfum de Guerlain qui a séjourné au Crotoy. Je présente comme chaque année également quelques œuvres abstraites et sculptures. Soit au total une soixantaine de pièces. Une exposition donc beaucoup tournée sur la couleur et toujours ce travail à partir de matériaux anciens recyclés.

 

Le Hable d'Ault 1

29X50 cm

céramique/ardoise

2025

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Salamandre - L : 50 cm

SALAMANDRE : UNE LONGUE HISTOIRE...

L'attribution du prix de sculpture jeune public au Salon de peinture et sculpture à Gouvieuxen mars 2025 , me permet de revenir sur les origines de cette sculpture, sur les belles rencontres qu'elle m'a permise de faire également depuis sa création en 2014.

La sculpture Salamandre est née en 2014 de la volonté d’expérimenter un travail dans la durée comme le réalisaient les peintres et sculpteurs de la Renaissance à la fin du XIXème siècle. C’est encore le cas aujourd’hui au XXIème siècle. La réalisation d’un tableau peut en effet durer plusieurs mois, voire plusieurs années. Dans le dernier livre de Patrick Grainville, La Nef de Géricault, aux éditions Julliard, l’auteur par exemple explique que la réalisation du Radeau de la méduse, un des plus célèbres tableaux de la peinture française réalisé au début du XIXème siècle, désormais exposé au Louvre a duré plus d’un an. Cela comprend le travail de documentation, les esquisses, la compréhension de tous les aspects du sujet et la finalisation de l’œuvre sans parler de la phase de présentation dans les salons avant un achat éventuel. Un tel travail prend toute l’énergie et le temps de l’artiste qui se consacre uniquement à ça quitte à y laisser sa santé.

Sans arriver à ces extrémités pour ma sculpture, j’ai mis quatre mois à associer les 240 morceaux de tuiles plates du Pays de Bray sur cette structure. Chaque morceau a été taillé de façon à s’agencer parfaitement avec les pièces voisines à la façon d’un puzzle en trois dimensions, collé sur une structure mélange de carton et de plâtre longue de 54 centimètres de long. Ce travail ingrat a nécessité de la patience et de la ténacité, qualités dont doivent faire preuve les artistes, tout comme l’acceptation du droit à l’erreur. Bref, je me suis plongé dans cette sculpture comme dans une aventure que j’ai vécu comme une expérience artistique..

  • « Sales bêtes, bêtes étranges ».

L’histoire de cette sculpture s’inscrit en plusieurs étapes. Sa genèse initiale est un projet intitulé "Sales bêtes, bêtes étranges ».  Mon travail en 2014, tout en continuant à mettre en valeur des matériaux anciens que sont la tuile, l’ardoise et la brique, s’est orienté sur ces animaux qui nous font intrinsèquement peur, frissonner ou nous faire perdre notre sang froid. Etrange, difforme venimeux, ils ont tout pour nous faire reculer, fuir et hanter nos cauchemars. Je veux parler des araignées, salamandres et autres méduses. Et pourtant, ils méritent qu’on s’intéresse à eux au niveau artistique parce qu’ils matérialisent nos peurs. Vaincre ces peurs contribue à mieux se connaître. Mon approche se veut « dédiabolisante » et ludique à la fois. Comment essayer de rendre sympathique ces « sales bêtes » ? D’abord en tout premier lieu, j’ai cherché à casser les stéréotypes, en leur donnant des couleurs décalées par rapport à la réalité et à les rendre mobiles suspendues à des fils.

Le côté ludique de la salamandre est à chercher ailleurs. Ne ressemble-t-elle pas à un immense rubiscube qu’on voudrait tourner dans tous les sens ou à un puzzle dont on voudrait compter le nombre de pièces sans se tromper ? L’inquiétant n’est toutefois jamais loin. Ne paraît-elle pas tapie, prête à bondir sur sa proie ? Sa couleur n’est pas non plus anodine. C’est celle de la terre et elle nous rappelle aussi que le danger peut être partout autour de nous et qu’il peut prendre milles facettes, autant que de morceaux de tuiles qui constituent sa carapace.

La légende veut que la salamandre vive dans le feu et soit immortelle. A ce titre, elle est devenue le symbole d’un roi de France, François 1er. Si on croit à la légende, celle-ci a peut-être hantée le foyer qui a servi à cuire ces petites tuiles du Pays de Bray qui désormais l’habillent.  En fait, la salamandre est un petit animal qui vit dans les zones humides et se cache dans les souches des arbres.

  • Résidence d’artiste et travail avec une école

La seconde étape de la vie de cette sculpture, l’a conduit dans une classe de CE2/CM1 de l’école primaire de Chepoix dans le cadre d’une résidence d’artiste au profit de la communauté de commune de l’Oise picarde de février à juin 2018. Lors de deux séances j’ai apporté deux sculptures, la salamandre et un scalaire, poisson exotique en forme de losange, et je les ai laissés 15 jours dans leur salle de cours où ils ont pu les voir en permanence. C’était pour certains  la première fois qu’il pouvait voir une œuvre d’art de près comme si un musée était venu à eux. J’ai divisé la classe en trois groupes : l’un a décoré des formes en carton que j’ai apporté représentant la salamandre, un second groupe a dessiné des salamandres sur du papier canson et le troisième groupe a représenté le biotope dans lequel vit la salamandre : zone humide et boisée ou trou dans la terre, sous des souches ou dans les murs. Cette frise faisait près de deux mètres et les élèves ont ensuite collé les formes décorées et leur dessin sur la frise. C’était très réussi. Il est important d’éduquer à l’art dès le plus jeune âge le jeune public. Pratiquer mais aussi venir visiter des expositions forme l’œil et ouvre l’esprit à plus de tolérance.

  • Art animalier et expositions

La troisième étape, ce sont les expositions sur l’art animalier que je présente depuis une dizaine d’année avec comme point d’orgue, la très belle exposition intitulée « A poils et à plumes » en duo avec Anne Dussaux, peintre animalière au château Conti à l’Isle Adam dans le Val d’Oise au printemps 2024 où j’ai présenté 25 sculptures d’animaux. Certains artistes se spécialisent dans l’art animalier tant celui-ci est exigeant. Il faut en effet connaître parfaitement l’anatomie des animaux, capter le mouvement et le regard, de sujet qui contrairement à l’homme ne prennent pas la pause. J’ai réalisé depuis près de 20 ans de création, 52 tableaux, sculptures ou installations avec des animaux mais je traite d’autres sujets comme les zones de rupture, les arbres, la gestuelle humaines, les lieux oubliés ou l’abstraction.

 Je n’oublie pas l’exposition du Salon de peinture et de sculpture à Gouvieux du 14 au 16 mars 2025 qui m’a valu le prix de sculpture décerné par le jeune public, pour cette sculpture. Cinq cent cinquante élèves de primaire des écoles de Gouvieux ont pu ainsi visiter cette exposition et voter. Je trouvais intéressant en exposant à Gouvieux, qui est entouré de forêts de présenter les animaux qui y vivent ; cerfs, écureuils, renards roux ou salamandre. Peut-être qu’au hasard d’une promenade vous croiserez l’un d’entre eux. Personnellement, à la fin de l’exposition, en repartant chez moi, j’ai croisé un sanglier sur la route qui remonte vers le village troglodytique en direction de Saint Maximin. La nature « sauvage » n’est jamais loin. Il suffit d’ouvrir l’œil.

PRINTEMPS DES POETES 2025

Dans le cadre du Printemps des poètes qui se déroule du 14 au 31 mars 2025 sur le thème très d'actualité "Volcanique", je vous  présente deux de mes oeuvres inspirées de ce sujet "La Terre en colère" et "Magma". Ce tableau est accompagné d'un poème récent en lien avec le sujet.

LA TERRE EN COLERE

L’idée de l’installation « La Terre en colère » m’est venue suite à la visite de l’église Notre-Dame sous Gerberoy dans l’Oise en 2021 dans le cadre des Journées européennes du patrimoine. Cet espace méritait d’accueillir une installation entrant en symbiose avec le caractère spirituel du lieu. Cela m’a paru comme une évidence.

Avec l’appui de la municipalité et le don de matériaux par l’entreprise de fabrication de tuiles EDILIANS, le projet de La Terre en colère est né bien avant les catastrophes naturelles que nous avons connu en 2022 et les années suivantes ; canicule, incendies, sécheresse, inondations.

Cette œuvre tentaculaire, mi pieuvre, mi coulée de lave, mi minérale mi animale renvoie aux monstres des tableaux de Jérôme Bosch. Cette installation protéiforme, d'une surface occupant 4m2, cherche à rappeler que le destin de tout ce qui existe sur Terre peut basculer à tout moment. Un cataclysme peut rendre stérile une Terre féconde telle la coulée de lave qui balaie tout sur son passage. Peut-être est-il encore temps de réagir aux conséquences de nos modes de vie actuels ?

La Terre en colère est fabriquée uniquement avec des matériaux de la région. La souche vient du bois de Caumont près de Gerberoy, les tuiles de saint Germer de Fly. C’est donc aussi une installation éco responsable avec un bilan carbone quasiment égal à 0.

La Terre en colère utilise enfin et fait référence à une pratique agricole locale, le broyat composé de tuiles concassées, utilisées pour combler les chemins creux et faciliter le travail des tracteurs.

La Terre en colère a été exposée durant Les journées du patrimoine en 2022 à l'église Notre Dame sous Gerberoy, église du XIVème siècle désacralisée mais abritant de remarquables fresques et a attiré de nombreux visiteurs. Parmi eux, « une chamane » ou qui se présentait comme telle m’a indiqué que « l’installation se trouvait exactement aux confluences des énergies existantes dans l’église à la croisée du transept ». Hasard ou non ?

 

La Terre en colère

2MX2M

bois (souche)/tuile

2022

La Terre en colère

MAGMA 

Forces telluriques sous-jacentes

Branle-bas de combat de la nature

 Branle-bas de combat dans le crâne du poète

Tempête sous la couche terrestre

Tempête sous un crâne

Nature en fusion, nature foudroyée

Embrasement généralisé

Nuées ardentes qui balaient tout sur leur passage

Embrasement généralisé

Inspiration partant dans tous les sens

Impossible d’endiguer, d’anticiper

La Terre est en colère et le fait savoir

Coulées de laves que rien ne peut arrêter

Coulées de laves comme autant de chevaux de feu

Vulcain a lâché ses féroces cerbères

Feu partout, dedans, dehors, chaud devant

Feu sur les pentes du volcan

Feu dans les entrailles de la terre

La Terre est en fusion

Les têtes sont en fusion

Le ciel est tantôt noir, tantôt rouge

Feu d’artifices impitoyable

Avancées inexorables des coulées comme autant de fers rouges

Sauvagerie des flammes dévorantes

Mâchoires de feu qui recrachent des braises incandescentes

Tout est cendre, grisaille et Apocalypse

Chaos de terre en mouvement perpétuel

Chaos de feu venu des entrailles de la Terre

Pour nous donner un avant-goût des Enfers.

Jaillissements frénétiques des mots sans retenue aucune.

Stérilité avant de devenir fécondité

Malheur des hommes avant d’en assurer leur richesse

Le poète n’en peut plus de contenir les mots

Projections des scories

Rugissement des fauves souterrains qu’on lâche

Ouragan de feu sur terre et dans le ciel

Ouragan à venir de mots et de vers

Les lignes de mots comme autant de coulées de lave

Les lettres couchées sur la feuille comme autant de scories

Seul le poète comprend cette nature hostile

L’inspiration, tel le magma balaie tout

Le flux des mots comme celui de la Terre

Et bientôt le retour au calme

Le poète pétrifié de ce qu’il a osé

La nature pétrifiée, reprend son souffle jusqu’au prochain assaut.

Impuissant mais fasciné

Fuir ou aller voir la bête

Tel est le dilemme éternel des hommes que nous sommes.

Essayer de comprendre

Ou se laisser porter par les mots du poète

Tel est le dilemme éternel des hommes que nous sommes.

 

Hemka

 

Magma

22X31 cm

briquette de parement/bille d'argile/ardoise

2018

Magma - 22X31 cm - briquettes de parement/ billes d'argile/ardoise - 2018
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RETOUR SUR L’EXPOSITION « MATIERES, MATERAUX » A LA GALERIE ASSOCIATIVE A BEAUVAIS

Clap de fin le 8 mars de l’exposition « Matières, matériaux » réunissant trois artistes, Elizabeth Goré, Natalia Jaime-Cortez et moi-même. Besoin de revenir sur cette exposition car il y a des expositions qui comptent dans la vie d’un artiste comme celles à l’abbaye de Fontaine-Guérard en 2023 et celle avec Anne Dussau au château Conti à L’Isle Adam en 2024 et maintenant cette exposition en début d’année à Beauvais.

Il était important pour moi de présenter à travers une trentaine de pièces mon évolution depuis 10 ans, mon attachement par les matières  que j'utilise au territoire et de tester ma nouvelle série en cours sur les portraits en mode serré ou très serré ainsi que des sculptures jamais présentées au public.

Mon choix a été de ne présenter que des œuvres pouvant se raccrocher à l’abstraction même si le figuratif n’est jamais loin.

Seul au moment de l’installation, j’ai pu m’imprégner des lieux et agencer les tableaux et sculptures par rapport à l’espace. Puis comme par magie, les papiers colorés de Natalia Cortez-Jaime sont venus répondre à mes céramiques colorées. Dernière pièce du puzzle, les tableaux d’Elizabeth Goré, aux tons de terre, sont venus répondre à mes tableaux en tuiles aux tons terreux. Il s’est dégagé de l’avis général une harmonie de cette exposition qui mélangeait les œuvres de deux générations d’artistes. « Imaginer une exposition, c’est orchestrer une rencontre entre l’art, l’espace et le public. Chaque projet repose sur une alchimie subtile : respecter les œuvres, sublimer le lieu et proposer un parcours fluide et immersif » (Cécile Degos, scénographe d’exposition)

Certaines expositions apportent de beaux cadeaux. Le premier fut d’être retenu, le second les rencontres diverses entre artistes, les échanges avec le public, la venue de l’atelier Spi photo de Gournay-en Bray pour des prises de vue  (https://www.spiphoto.fr/exposition-matieres-materiaux-a-la-galerie-associative-13-rue-greber-a-beauvais) ou la visite commentée de l’association L’Arche de Beauvais, personnes en situation de handicap mental pilotée par Yannique. Ce public, est toujours un moment de vérité pour l’artiste, ces personnes exprimant de façon naturelle et spontanée leur ressenti. Il est toujours difficile pour l’artiste de trouver les mots justes. 

Merci enfin aux personnes qui me suivent et dont certains sont venues du Val d’Oise ou des Yvelines et aux auteurs de ces commentaires

- " Je suis allée voir votre expo à Beauvais la semaine dernière, c'est magnifique" (FD)

- " Je suis passée hier samedi à l'expo de la galerie associative . Je me suis régalée les yeux par ces trois beaux projets artistiques, plus particulièrement le tien qui m'a parlé par mes racines architecturales et picardes. Tu as mis à coeur  de mettre à sens ces matières influencées par notre région. A ce jour, il nous est possible de faire un choix d'écoute en matière de musique, de lecture en matière de livres mais l'architecture nous est imposée et tu as pris le contre pied sur cette influence qui nous environne en nous montrant sur un autre angle la beauté de ces matériaux. Il me fallait te remrcier de ce sentiment de gratitude" (CD architecte)

Cette réflexion m'a fait prendre pleinement conscience que les matériaux ainsi utilisés sont libérés de la contrainte architecturale pour exister en tant qu'eux-même.

 

Mécanismes

40X35 cm

céramique/bois

2024

SOURCE D'INSPIRATION : RESILIENCE ET CHANGER LE REGARD  (1/3)

Quelles sont vos sources d'inspiration? C'est souvent une question posée aux artistes. Mon fil directeur ou plutôt mes fils directeurs sont d'une part  la notion de résilience des personnes et des biens, objet de cet article et d'autre part un lien étroit avec le territoire, sans oublier  des rencontres avec des personnes, qui me marquent ou me donnent des matériaux. On touche donc ici certaines questions philosophiques. Aussi j'ai repris un échange avec Jean-Pierre Thuiller, professeur de philosophie lors d'une exposition au centre cdulturel Le Domino à Méru en décembre 2022, pour illustrer mes sources d'inspiration et mes motivations.

 

1° Voulez-vous, pièce à l’appui, nous parler de cette métamorphose ?

Une métamorphose est une transformation qui change l’aspect et donc le regard qu’on peut porter sur une personne, un objet, un animal. Nos sociétés consuméristes ont tendance à tout jeter, surtout si c’est cassé ou trop vieux. Mon idée, c’est qu’il y a toujours quelque chose de bon, de beau dans toute chose, encore faut-il le trouver et le sublimer. Un coup de pinceau sur une bille d’argile servant à garder l’humidité des plantes vertes peut le transformer en visage. Un ponçage à la disqueuse sur un morceau de gouttière en zinc peut marquer la limite entre le ciel et la terre., de simples bouchons de bouteilles de lait peuvent générer l’idée de lègereté et de liberté. Bref la métamorphose s’est non seulement re transformer, valoriser l’objet mais aussi surtout le sortir de son contexte du quotidien

2° « Une nouvelle vie » suppose une « ancienne vie ». Vos supports ont donc de la mémoire. Revendiquez-vous que votre travail artistique soit aussi un « travail de mémoire » comme pourraient le suggérer « La tour des Conti à Méru », « terre du Nord », « Hôpital », « Chantier naval »…? Comment pourquoi ?

Les matières que je travaille ont une histoire : celle des artisans d’autrefois qui travaillaient dans les carrières de gisement d’argile ou dans les briqueteries ou tuileries. Mémoire des maisons anciennes, des églises, voire des châteaux, qui disparaît parfois au hasard des rénovations nécessaires.  Un accordeur de piano aveugle venu à la maison m’a même dit en palpant mes œuvres ressentir encore l’énergie, la chaleur de la cuisson. Les traces de l’usure des matériaux, leurs imperfections dont je tente de me servir, les traces de lichens sont des formes de mémoire laissées par le temps. La série sur les lieux collectifs oubliés dont fait partie « La tour des Conti », « Terres du Nord », « Hôpital », « Chantier naval » est une autre forme de référence à la mémoire ou plutôt au refus d’effacer la mémoire collective pour passer vite à autre chose Ces lieux sont condamnés à bref échéance, au mieux à se dégrader au pire à être détruit. Tel un historien, sur des lieux que j’ai visités j’essaye de figer leur présence voire de les faire redécouvrir en montrant ce qui n’est plus visible, les intérieurs délabrés.

3° Au-delà de l'écologie, vos œuvres présentent un caractère politique. Comment faites-vous le lien entre ces deux domaines ? Quelles œuvres exposées ici vous semblent illustrer votre propos ?

Je suis un artiste qui vit avec son temps, je dirai en interaction. Je donne un avis sur les sujets d'actualité, qui n'est que le mien mais qui doit amener le visiteur à faire son propre cheminement. L'artiste doit s'interroger sur la société, les grands changements. Très tôt, je me suis interrogé dans mon œuvre comment changer le regard de l'autre, par l'autodérision, l'humour par exemple comme avec une série sur les animaux qui font initialement peur comme les araignées, les méduses ou la salamandre visible dans cette exposition. Je me suis intéressé aussi à la solitude, au rapport à la maladie et beaucoup au sujet des migrants. Faire une œuvre comme Mare Nostrum n'est pas porteur en terme d'espoir de vendre. Mais cela m'a fait un bien fou de la réaliser. J'ai senti aussi, bien avant le mouvement des gilets jaunes, qu'on rentrait dans une zone de rupture symbolisée par les falaises, zone de rupture entre le ciel, la mer et la terre comme dans le tableau Falaises Bien évidemment travailler des matériaux recyclés, dénoncer l'accumulation d'objets inutiles dans nos sociétés de consommation m'amène sur le champ du politique pour tenter d'éveiller les consciences au travers par exemple des tableaux Accumulations1 et Accumulations 2. On ne peut plus produire autant de déchets. Allez dans une déchetterie, c'est un balai incessant de voitures qui déversent leurs rebuts, dont certains sont encore utilisables. Certaines contraintes qui nous sont imposées ne passent pas. C'est le sens de la sculpture « Les hommes entonnoirs »

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4° Plusieurs de vos œuvres évoquent le temps, celui qui passe ou ne passe pas : « temps suspendu », « heures dorées » Pourquoi ce thème et pourquoi ces matériaux ?

L'homme n'est que de passage sur Terre. L'horloge biologique tourne. J'ai la soixantaine. Il paraît que la soixantaine est la jeunesse de la vieillesse comme la cinquantaine, la vieillesse de la jeunesse. Je m'intéresse aux traces, aux empreintes que je laisserais après mon départ. Mes créations sont ce qui me caractérise le mieux dans les multiples vies que j'ai eu. Le temps file, j'en ai fait une allégorie sous forme d'un tableau intitulé Sablier, œuvre vendue. Pour cette exposition, outre les traces du temps sur les matières, j'ai voulu au travers de la sculpture « Temps suspendu », rendre compte d'une période improbable au début du premier confinement où tout s'est arrêté sans savoir si l'Histoire reprendrait son cours. La série « Heure dorée » parle d'une heure particulière dans la journée où les couleurs sont transfigurées. Les psychanalistes parleraient d'une allégorie de l'âge mur. Picasso aurait dit que le jaune est la couleur de la folie. L'heure dorée précède, si on emploie une terminologie photographique, « l'heure bleue ». On passe en moins d'une heure des couleurs chaudes aux couleurs froides. L'heure n'est pas encore venue de traiter l'heure bleue, mais j'y pense. Quant aux matériaux utilisés, ce sont ceux de mes rencontres parfois avec d'autres artistes, parfois avec un matériau qui m'attend au creux d'un chemin. Pour la série « L'Heure dorée » » ce sont des chutes en céramique d 'une installation réalisée à la Chapelle aux Pots par Patricia Lemort. Ainsi, on peut dire que cette série a été réalisée à quatre mains.

5° Votre travail artistique n'est pas seulement intemporel. Certaines œuvres touchent même à l'actualité : « Penser à tout », « Habitat dans les arbres », « Hommes entonnoirs », « A la vie, à la mort ». Comment les matériaux de rebut peuvent-ils illustrer ou inspirer cette actualité ?

Mon travail est fait de rencontres entre des sujets qui me parlent comme les migrants, la condition féminine, la souffrance au travail, l'approche parfois dévoyée de l’écologie et des matériaux qu'on me donne, que je trouve dans des déchetteries ou parfois que j'achète. J'ai toujours un carnet de dessin sur moi ou j'écris beaucoup et dessine un peu. Les idées existent dès lors. Il ne manque plus que l'occasion pour les matérialiser. Dans mon atelier, j'ai une grande table sur laquelle sont posés des tas d'objets ou de matériaux. Je passe devant dix fois par jour et cela favorise ma création. Parfois, cela peut être très long. J'ai mis dix ans par exemple à trouver comment travailler un entrelacs de branches de lierre ou par cela paraît commence une évidence. Pour répondre à votre question, peut-être que l'actualité d'aujourd'hui particulièrement lourde et anxiogènes explique par notre passé collectif et que les erreurs commises, symbolisées par ce qu'on veut faire disparaître, les rebuts, ressortent inconsciemment dans la mémoire collective. On ne fait pas table rase du passé. Car il fait partie de notre ADN. Le travail qu'on m'a demandé de mener ici sur la tour des Conti allait certainement dans ce sens.

6° Deux tableaux présentent des similitudes, « Cosmos » et « Matrice ». Cosmos, c'est à la fois une fleur et un univers. Y-a-t-il un rapport entre la matière, qui selon vous ne se perd pas, et le cosmos en perpétuelle mutation, qui englobe toute matière ? Verriez-vous dans le cosmos, que l'on peut considérer comme la matrice de toute chose, un bien à préserver ?

Une connaissance, psychiatre, trouvait au début que mon travail était comme moi, carré. La vie a fait que j'ai voulu arrondir les angles et découvrir le cercle. C'est entre parenthèse le sujet de mon exposition virtuelle sur mon site internet, preuve que j'ai fait des progrès. La première série utilisant le cercle a traité justement des quatre éléments, l'eau, la terre, le feu et l'air en reprenant la même forme, celle de la matrice originelle et en modifiant uniquement les motifs en mélangeant tuiles anciennes et modernes. Là aussi on ne peut construire un avenir sans référence à son passé profond. « Cosmos » se voulait une synthèse des quatre éléments, le symbole de mondes différents mais faisant un tout. Le fond noir renvoie à l'espace intersidéral et à notre solitude. L'interprétation d'une œuvre d'art est passionnante. Le visiteur, l'acheteur peuvent voir des choses auxquelles l'artiste n'aurait jamais pensé. Ainsi pour « Cosmos », vous évoquez une fleur, je n'y avais jamais pensé.  Une autre personne durant le vernissage a évoqué les couleurs de Toscane et de la terre de Sienne. Il en est de même pour mes tableaux intitulés Bastides. Moi j'y vois de solides corps de ferme du sud-est. Lors d'une exposition au Crotoy en baie de Somme, terre de la race des chevaux Henson, les visiteurs locaux y voyaient tous un groupe de chevaux.

Mes matériaux sont en perpétuelle mutation, parce que je les transforme, découpe, assemblage, destructure pour mieux les structurer et leur donner un sens. Je récupère tous les petits morceaux et il m'arrive d'en faire des compressions ou des œuvres inspirées du broyat, pratique agricole visant à boucher les trous des chemins creux avec des tuiles concassées.  Certaines œuvres peuvent même être cassées et renaître à l'occasion d'une exposition particulière comme ici « De la Terre à la Lune », « Arlequin » ou « Promenade en ballons »

Heure dorée 3

7° A propos de deux œuvres « Des vides et des pleins » et « Claustra », qu'auriez-vous à dire sur la relation entre le vide et la matière ?« 

Des vides et des pleins » fait référence à l'immense artiste plasticien sud-coréen Lee Ufan. Il conçoit des maisons ou cabanes du silence et fait coexister dans un minimalisme le plus pur, éléments minéraux et réalisation humaine comme des barres ou des plaques d'acier. La notion de vide et de plein est très présente dans la culture extrême orientale. La notion de vide est très relative, car le vide est rempli de choses invisibles et peut se remplir à tout moment. J'ai trouvé intéressant d'utiliser cette forme de cage, très présente chez certains artistes de la première moitié du XXème siècle comme Giacometti pour créer une suspension de formes opposées et chargés d'une histoire propre. L'une est un couvercle de boîte de peinture ramassé sur le parking d'un supermarché, l'autre un essai de dégager un cadre dans une tuile. Différents ils sont pourtant complémentaires et comme fait l'un pour l'autre. Claustra est une œuvre plus ancienne alors que je travaillais sur la notion d'élévation. Mais sa transparence, l'alternance de vides et de peins la rapproche effectivement de Des vides et des pleins.

8° L'une de vos œuvres exposées s'intitule « Spiritualité ». Pouvez-vous nous la commenter ? Et pensez-vous que les objets, voire la matière brute, puissent être pour nous sources de spiritualité, comme l'évoquent à mon avis « Accumulations 1 et 2 », « Pianiste » « Accumulation de couleurs » ?

C'est une œuvre ancienne mais forte. Certaines de mes œuvres renvoient aux sujets religieux comme la série Matrice ou Christ en croix. Je n'ai aucune difficulté à exposer dans les églises. J'ai même créé une installation « La Terre en colère » pour la chapelle notre Dame à La Chapelle sous Gerberoy l'automne dernier. En tant qu'homme j'ai besoin de tutoyer la spiritualité ne serait-ce qu'on travers de l'inspiration qui est chaque fois un cadeau divin dont on peut faire le meilleur comme le pire. Pour en revenir à l'oeuvre, certaines tuiles présentent des défauts, ici un trou, on les appelle alors des monstres. Ce trou m'a fait tout de suite penser à un judas, à l'oeil de notre conscience qui voit tout, avant qu'il ne soit remplacé par la surveillance électronique qui fait qu'on sait tout de nos vies et de nos moindres mouvements.

Les matières me parlent en quelque sorte. Elles manifestent des attirances ou des répulsions mutuelles. Je ne suis jamais arrivé à finir certaines œuvres alors que j'utilisais des process éprouvés. J'ai souvenir d'une sculpture qui a cassé par trois fois alors que je devais l'installer dans un jardin remarquable cet été et qui trône dans mon jardin. C'est Lamartine' qui s'interrogeait pour savoir si les objets inanimés ont une âme. Pour moi oui.

« Accumulations » est une forme de dénonciation de notre société de consommation, du toujours plus et prône un retour à une certaine sobriété pour employer un mot à la mode, que certains poussent jusqu'à l'ascétisme. On est proche  alors de la spiritualité.

9° Tout cela nous renvoie à l'humain, l'humanité et la société, illustrés entre autres par « Portrait de famille » et « Bain de foule ». Mais je voudrais d'abord m'arrêter sur une œuvre qui me pose question : « Autoportrait » Faut-il y voir une représentation symbolique, dans ce cas laquelle, ou bien vous voyez-vous vraiment ainsi ?

L'exposition commence par « Portrait de famille » et se termine par « Bain de foule ». Tout est dit sur la place de l'humain dans cette exposition. Une de mes connaissances, vétérinaire de profession me disait « On est attiré par nos semblables (humains) et quand il n'y en a pas, par les animaux » Cette disposition n'était pas voulue initialement mais tombe à point. Rien n'est dû au hasard.« Portrait de famille » évoque une situation que nous avons tous connu pendant le confinement, masqués. « Bain de foule » a plusieurs interprétations, festive comme les concerts ou plus sombre. A vous de juger!  L'art c'est aussi le libre arbitre, le droit d'aimer ou de ne pas aimer.

« Autoportrait » est au milieu de l'exposition. L'artiste en quelque sorte garde un œil sur son exposition et est toujours présent. Il accueille de façon bienveillante les visiteurs en espérant ne pas trop leur faire peur avec sa « gueule cassée » et fragmentée façon Sylvain Tesson. L'artiste a eu plusieurs vies, il le revendique sans atermoiement. Il est encore debout c'est le principal. Il a parcouru ses « Chemins noirs » comme l'écrivain, s'est noyé dans un océan de matière comme Sylvain Tesson dans un océan de « Blanc » pour chercher la rédemption. Au bout du chemin, le « Connaît-toi toi-même » de Socrate ou raison rime avec passion d'où un être biface. Au final une représentation très symbolique.

Autoportrait

10° Dans votre œuvre, au travers de tous ces thèmes que nous avons abordés se dégage une unité, une conviction, que je résumerais par le terme de « résilience ». Êtes-vous d'accord avec cette interprétation ? Pouvez-vous nous en dire plus ?

La résilience est bien l'art de se reconstruire après avoir résisté aux éléments, aux épreuves, à la volonté délibérée des hommes de détruire. Elle nécessitée du courage et comme dans l'alpinisme des points d'appui. L'objectif de mon travail est de prouver que l'on peut toujours tirer parti d'un objet, d'un matériau, d'un être humain. Il faut partir du postulat que tout est bon, encore faut-il savoir comment l'utiliser au mieux. L'art a été ma résilience. J'emploie volontiers la formule choc « de la déchetterie à la galerie », Cela n'est pas galvaudé. Il y a une vraie satisfaction à redonner vie à ces objets et à les sortir du néant pour les mettre à la lumière. On est alors dans le carré magique « nostalgie, surprise, joie, satisfaction »génératrice d'émotion chez la personne qui regarde l'oeuvre.

11° Je n'ai pu être exhaustif au cours de cette visite, car le temps n'est pas suspendu...Y aurait-il une œuvre , un sujet que ne j'ai pas abordés et dont vous tenez particulièrement à nous entretenir ?

Concernant le tableau ou la sculpture dont j'aurais voulu parler, Chemin de vie, il n'est pas présent dans cette exposition car déjà vendue. Une sculpture réalisée dans le même esprit est à l'affiche de l'exposition Promenade en ballons.  J'ai beaucoup travaillé avec les moules en bois qui servent à faire les flans de Beauvais. Chemin de vie comme Promenade en ballons parlent d'une même histoire : sortir du moule et retrouver le chemin de la liberté, gagner en sérénité et en légereté et donc aboutir à la résilience.

Chemin de vie

SOURCE D'INSPIRATION : LA MATIERE ET LE TERRITOIRE (2/3)

Quelles sont vos sources d'inspiration? C'est souvent une question posée aux artistes. Mon fil directeur ou plutôt mes fils directeurs sont d'une part  la notion de résilience des personnes et des biens et d'autre part un lien étroit avec le territoire, objet de cet article sans oublier  des rencontres avec des personnes, qui me marquent ou me donnent des matériaux.

L'immense architecte Renzo Piano dit "Avant tout projet, il faut savoir écouter le lieu, même vide, s'en imprégner pour mieux l'appréhender et le restituer sans le trahir" Ma démarche par rapport aux matériaux du Pays de Bray est identique. Je vis et travaille dans cette région depuis vingt-cinq ans. Tout ce que je vois et récupère sur ma table de décharge dans mon atelier,  dessinne sur mon carnet qui ne me quitte jamais,  passe par ce filtre. Une de mes expositions phare s'intitule "Terres d'ici". Le Salon d'art contemporain à l'Hôtel du département à Beauvais du 14 au 16 février 2025 est l'occasion de montrer combien ma création est en lien étroit avec le terrioire passé et présent.

Entre le milieu du XIXème siècle et le milieu du XXème siècle, le Pays de Bray entre Beauvais et Gournay et même au-delà jusqu’à Neufchâtel en Bray était très industrialisé. Il faut imaginer de grandes entreprises, tels Boullenger à Auneuil, Colozier à Beauvais, Desmarquet à Ferrières employant des milliers de personnes autour de briqueteries, tuileries, usines de carreaux sans parler des ateliers de potiers disséminés dans la région avec des pôles à Armentières, la Chapelle aux pots, Savignies. La toponymie des villages et des rues rappelle cette activité comme La Chapelle aux Pots, Saint Samson La Poterie, Saint Germain la Poterie. Un village comme Savignies accueillait au début du XXème siècle 40 potiers. Quelques cheminées ou grands hangars rappellent cette activité autour de la terre comme à Espaubourg sans oublier saint Paul où était installée une manufacture de céramique et de faïence dans l’enceinte de l’ancienne abbaye. Plusieurs cités ouvrières accueillaient les ouvriers et leur famille, le tout à proximité des carrières d’argile. Aujourd’hui, il ne reste plus qu’une briqueterie, De Wulf à Allonne, une tuilerie, Edilianz ex Iméris à Saint Germer de Fly, une fabrique de carreaux à saint Samsom la Poterie avec les frères Algrave et une faïencerie à Ponchon.

Mon travail cherche à faire réémerger cette mémoire oubliée et à redonner une nouvelle vie et un nouveau sens à ces matériaux amenés à disparaître. J’ai arpenté des tas de gravats à la recherche de la perle rare tel un archéologue, fouillé dans des déchetteries, reçu des matériaux. Mon travail, qui s’inscrit dans le courant artistique du Recyclart, utilise principalement la tuile mécanique comme celle de Beauvais ou la petite tuile plate du pays de Bray, des tuiles vernissées fabriquées à la fin du XXème siècle par Iméris dans une tentative de s’implanter sur le marché asiatique et plus récemment les carreaux de céramique industrielle servant à couvrir les sols et une partie des murs intérieurs et des tessons de faïence très utiles pour rendre les corolles de fleurs sans oublier l'apport précieux de chutes de céramique artisanale réalisée par Patricia Lemort avant qu'elle ne quitte la région.

Je me sers aussi des matériaux des dernières industries du territoire, ce qui me donne l’occasion de parler de ce patrimoine industriel commun et encore vivant au travers des différentes salons d’art contemporain auxquels je participe en Ile de France, Normandie et Picardie. Mon approche est donc à la fois un hommage aux artisans et ouvriers d'autrefois et une approche plus contemporaine, plus abstraite du travail de la terre, un travail toujours réalisé à quatre mains puisque je ne fais que reprendre le relais pour tenter de finaliser l'objet.

 

Composition florale 5

34X44 cm

céramique industrielle/tuile/ardoise

2025

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SOURCE D'INSPIRATION : DE BELLES RENCONTRES (3/3)

Quelles sont vos sources d'inspiration? C'est souvent une question posée aux artistes. Mon fil directeur ou plutôt mes fils directeurs sont d'une part  la notion de résilience des personnes et des biens et d'autre part un lien étroit avec le territoire,  sans oublier  des rencontres avec des personnes, qui me marquent ou me donnent des matériaux, objet de cet article. 

A l'époque où il y a de moins en moins de déchetteries sauvages et c'est tant mieux, où les déchetteries intercommunales commercialisent nos déchets, l'apport de matériaux par des particuliers sensibles à la fois à la beauté des matériaux qu'ils ont en leur possession mais aussi à mon travail est une source non négligeable pour renouveler le stock de matériel. Que ces personnes en soit remerciées.. Elles sentent l'existence d'un potentiel et me passe le relais, parfois pour que l'objet tout simplement ne disparaisse pas. Il faut tenter de comprendre alors le lien entre cette personne et l'objet et le trahir le moins possible.

J'ai choisi à titre d'exemple ce tableau récent intitulé Touareg. Il s'agit à la fois d'une rencontre improbable avec un vrai Touareg, avec le plus profond de moi-même puisque je suis né au milieu du désert  et du don fait par Patricia Lemort de plusieurs plaques de céramiques artisanales présentant des défauts de cuisson.

Un texte explique les conditions improbables de cette rencontre.

Mon fil directeur pour 2025 étant le portrait traité de façon abstraction colorée, réaliser un touareg en majesté m'a apparu comme une évidence.

 

TOUAREG

Chacun à son tour fait un dessin avec le pinceau trempé dans de l’eau, sur l’immense rouleau de papier utilisé normalement pour la calligraphie. Les dessins ont vocation à s’effacer petit à petit en séchant comme par magie. Une forme de vague, qui en fait est une dune apparaît suivie du dessin d’un dromadaire. Le décor est campé. Il apparut sur le pas de la porte, magnifique, beau comme dans ces images d’Epinal représentant les Touaregs ou dans les romans de Pierre Benoît. Plus vrai que nature. Un visage noble, entouré d’un keffieh blanc qui tombait naturellement sur ses épaules, une djellabah bleue intense, bordée d’un liseré d’or et surtout, surtout, son visage d’ébène, un regard fier d’un homme qui a l’habitude des voyages dans son Niger natal mais aussi à travers le monde, jusqu’à ce jour aux marges de la Normandie. Hier à Paris, aujourd’hui à Neufmarché, demain à Montpelier, il faisait ce que son peuple savait faire et avait toujours fait, voyager et faire du commerce.

La tenue était splendide même si tout un chacun savait qu’elle relevait du folklore. Les Touaregs du Niger sont-ils toujours les hommes bleus du désert ou portent-il au quotidien jean, T shirt et basket ? Pour un occidental, certainement. Alors il était en représentation. Oui, il représentait son peuple, son village, aimable et souriant presque modeste perdu dans une assemblée de gens savants venus écouter une conférence.

Alors, il nous fit le plus beau des cadeaux. Il nous parla des siens et nous amena un instant au cœur des oasis, aux portes du désert du côté d’Agadès, sous la tente où chauffe toujours un thé à la menthe pour accueillir le visiteur. Cette fois-ci c’était lui le visiteur et pourtant c’était lui qui offrait le thé à la menthe, façon de remercier de l’hospitalité. La vie au Niger comme ailleurs n’était pas facile, peut-être là-bas plus qu’ailleurs. La guerre était passée par là. Les touristes avaient fui. Les Touaregs qui vendaient leur artisanat autrefois sur place ont dû faire autrement. Autrement, ils savent faire comme quand l’oued s’assèche, quand l’eau de l’oasis se tarît, quand le vent du désert se lève et les grains de sable fouettent le visage jusqu’au sang. Les tentes sont pliées, les dromadaires scellés et la longue caravane s’ébranle nonchalamment sur la crête des dunes jusqu’au prochain point d’eau. Ils ont fière allure sur leur monture, véritables vaisseaux du désert au milieu de cette mer de sable. Le bivouac s’installe, la vie reprend son cours juste un peu plus loin qu’avant. Le nomadisme après tout n’est-il pas assimilé à la liberté, la sagesse et la simplicité !

Lui, eux, c’est vers l’Europe maintenant qu’ils voyagent pour vendre leur marchandise. Il a dressé son étal de colliers, de bagues, de colifichets sans oublier les Croix du Sud, fierté et symbole de l’artisanat touareg, travaillés par les forgerons sur place. Il attend le chaland, comme ses ancêtres avant lui dans les souks d’Agadès et Ghardaïa, noble et un brin désabusé, mais quoi faire d’autre ? Les quelques euros gagnés iront à la communauté. Mais il n’est pas triste. Sa fierté, c’est de voyager au-delà des horizons comme ses ancêtres, éternels sillonneurs de routes commerciales à travers le Sahara et le Sahel, méharistes accomplis et d’apporter du rêve, la plus grande des richesses. Nous imaginer un instant sous la voute de la nuit étoilée, face à des montagnes de dunes qui demain n’existeront plus, se faire bercer de mirages. Le temps est passé, les dessins ont disparu. Tout n’était que mirage !

 

Touareg

37X43 cm

céramique/ardoise

février 2025

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Comme une fleur

NOTE D'INTENTION POUR LE SALON DE LA CREATION ARTISTIQUE DE MOUY (60) DU 6 AU 11 FEVRIER 2025 OU JE PRESENTE TROIS SCULPTURES DE FEMMES

 

AUTOUR D’ELLES, HISTOIRES ET CORPS DE FEMMES

Artiste plasticien installé dans l’Oise à Senantes, je travaille avec des matériaux recyclés du Pays de Bray tels des tuiles, ardoise, briques, morceaux de zinc ou de métal rouillé. Parmi les thèmes récurrents sur lesquels je travaille on peut citer les zones de rupture, les lieux oubliés, les arbres, les animaux, l’abstraction mais aussi la gestuelle humaine et plus particulièrement féminine.

J’ai réalisé une série de sept petites sculptures intitulée "Autour d'elles : Histoires de femmes, corps de femmes". Je suis parti du premier cours aux Beaux-Arts" Une ligne, une surface, un volume" pour faire évoluer une surface (une silhouette stylisée de femme) en fer autour d'un volume, une sphère à facette réalisée en tuile. Par leurs titres évocateurs "Guerrière prête" à bondir", “Retour sur Terre”, “Jongler avec plusieurs vies”, "Tout le poids du monde sur les épaules", “Comme une fleur”, " Se Retirer une épine du pied" elles évoquent des situations que les femmes connaissent bien.

Pour cette exposition à Mouy, je présente trois d’entre elles. Les influences de Camille Claudel et de Germaine Richer, deux grandes figures de la statuaire féminine, ne sont jamais loin.

Je tente de saisir des instantanés de vie de femme vus par un homme. Cette série s'efforce de capturer et de retranscrire l'énergie qui émane de chaque femme. Cette citation de l'artiste plasticienne Charlotte Perrot illustre bien ma série réalisée entre février 2023 et aujourd'hui. " La femme incarne à la fois une forme de force, d'indépendance et d'extravagance, mais aussi une certaine douceur, une fragilité".

NOTE D'INTENTION CONCERNANT L'EXPOSITION "MATIERES, MATERIAUX" A LA GALERIE ASSOCIATIVE A BEAUVAIS DU 25 JANVIER AU 8 MARS 2025

« La matière est le subjectile à l´état brut, le matériau, ce qui est déjà mis en forme. La matérialité, ce qui les réunit. Or peut-on penser la matière sans évoquer l´immatériel, le « vide » ? Cet état n´est pas opposé ou complémentaire à la matière mais en est le corollaire. Le « vide » est constitué de microparticules, d´ondes, ce sans quoi rien n´existe mais que tout rassemble. 

En ce début d´année 2025, trois plasticiens, deux femmes et un homme, deux générations différentes investissent l´espace de la galerie associative à Beauvais, offrant à ressentir ce qui les réunit comme ce qui les distingue ou les oppose au sein des deux salles de l´espace associatif. » »

Anguerran Frantz-Tanguy

Pour cette exposition à laquelle participent Elizabeth GORE, Natalia JAIME-CORTEZ et moi-même à la galerie associative à Beauvais du 25 janvier au 8 mars 2025, intitulée « Matières, matériaux », je mets en avant comme matériaux les petites tuiles plates du Pays de Bray et la céramique artisanale ou industrielle dont j'ai récupéré des chutes. Le Beauvaisis est une terre de céramistes. Mon travail sous forme de tableaux de céramique est en quelque sorte un hommage au passé mais il cherche également à affirmer une approche plus contemporaine qui n’hésite pas à associer d’autres matériaux. C'est un prolongement de mes expositions intitulées "Terres d'ici".

 Je présente six mini séries : trois très colorées, Recollement à partir de tuiles vernissées, d’ardoise et de zinc, Heure dorée, travail avec comme point de départ une approche photographique avec des céramiques artisanales, Portraits d’élégantes chapeautées, série qui n’a jamais encore était présentée, à partir de chutes de céramique artisanale. Les séries Perspectives, Humain et Impacts sont réalisées avec des tuiles aux couleurs plus terreuses.

Lors de l’installation mercredi 22 janvier, j’ai cherché à créer une ballade chromatique allant du bleu vers le rouge intense des tuiles en passant par le rose, le vert, le jaune avec des ruptures dans l’accrochage. Ces variations de couleur répondent bien avec les tentures colorées de Natalia JAIME CORTEZ exposée dans la même salle.

Je présente enfin 5 sculptures réalisées avec l’association de divers matériaux. Au total je présente une trentaine d'oeuvres réalisés avec une douzaine de matériaux différents.

 

Elégante chapeautée vert

52X32 cm

céramique/ardoise

décembre 2025

 

 

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NOTE D'INTENTION CONCERNANT LA SERIE "LES IMMATERIELS" PRESENTEE LORS DE L'EXPO D'HIVER A LA GALERIE ASSOCIATIVE A BEAUVAIS DU 3 AU 17 JANVIER 2025

Je présente pour cette exposition Expo d’Hiver 2025 à la galerie associative à Beauvais, une série de 4 tableaux, traitant d'éléments immatériels comme le pollen, les grains de sable, la poussière ou le tanin, positionnée de façon identique et combinant céramique et billes de verre de même couleur. Il s'agit de matière physique mais qu'on ne peut attraper. Ce travail s'inscrit dans le double courant artistique du Recyclart et de l'abstraction colorée qui sera une des tendances de l’art contemporain en 2025. J’explore par ce biais des palettes audacieuses et des compositions dynamiques qui captent l’œil et stimulent l’esprit. Ce travail s'inscrit enfin dans la longue tradition des céramistes du Beauvaisis.

Dans mon travail de touche à tout d’objets détournés, je me suis servi de bille de verre collectors. Quoi de mieux en effet qu’une bille de verre pour représenter les yeux d’un personnage, des comètes, un amas de couleurs synonyme de chaos chromatique... ou tout simplement des billes.

Tout se perfectionne même les billes. Il existe aujourd’hui des billes collectors ‘T-Rex, Pirates, Tiger, Zèbre, Candy, Blue Lagoon, Boa vert, etc… bien utiles pour la réalisation de cette série. Pollen est réalisé avec des « Green boa », Poussière avec des « Pirates », Grains de sable avec des « T-Rex » et Tanin avec des « Iguanes ». Tanin est présentée pour la première fois en exposition.

En exposition, ces tableaux font immédiatement réagir grands et petits et agissent comme des ascenseurs émotionnels générateur de souvenirs et de bons moments. Lors d’une exposition récente à Beauvais, une artiste devant ces tableaux s’est immédiatement souvenue des parties avec ses frères dans le grenier du grand-père. « On calait le calot dans un trou du plancher et puis on jouait. Cela pouvait durer des heures ». Un autre artiste renchérit « Quand j’étais petit j’habitais à Eu où se trouvait la verrerie De Jonquières. Un jour l’usine a pris feu. Je me rappelle que tous les enfants des alentours venaient dans le décombres ramasser des billes par sceau entier. On les ramassait à la pelle ».

Vu avec un regard de grand en reprenant les théories du psychanaliste Jacques Lacan, ces billes de verre nous renvoient aussi notre propre image. Est-ce nous qui regardons le tableau ou l’inverse comme s’interrogeait Marcel Duchamp ?

Dans le cadre d’une démarche éco-responsable, les fonds sont réalisés soit avec des chutes de tuiles vernissées en provenance de l’usine Iméris de saint Germain de Fly, soit avec des chutes de céramique artisanale réalisée dans le cadre d’une résidence par la céramiste Patricia Lemort et cuites dans les fours de l’usine de carreaux de Saint Samson La Poterie.

 

Tanin

26X32 cm

céramique/bille de verre

décembre 2024

TOUR EIFFEL : COMPRENDRE LE PROCESSUS CREATIF

Tour Eiffel est une commande pour une personne vivant en Argentine, qui n'est jamais venu en France et qui souhaitait qu'on lui ramène "quelque chose" de Paris.

Pour être allé en Argentine en juillet 2024 et avoir vu l'exposition des artistes argentins Cristina Ruiz Guinazu et Matéo Andréa, intitulée Regard rétrospectif à La galerie associative à Beauvais du 9 novembre au 20 décembre 2024, j'ai compris que leur référentiels étaient différents. Tout est en grand, coloré autant que leurs montagnes, leurs maisons et les étals des marchés artisanaux. Il fallait un monument qui ait du sens en terme de dimension. Seule la tour Eiffel pouvait avoir une dimension qu'il puisse comprendre. Peindre les toits de Paris en arrière fond, couleur zinc façon Caillebotte, n'avait aussi aucun sens quitte à être abstrait. Pour les études préparatoires, j'ai utilisé le livre de photos La tour Eiffel, un phare universel de Catherine Orsenne.

Justement la tendance de l'art contemporain pour 2025 est l'abstraction colorée. Les artistes explorent des palettes audacieuses et des compositions dynamiques créant des oeuvres qui captent l'oeil et stimulent l'esprit. L'art contemporain de 2025 se distingue par sa diversité et son hybridité. L'engagement social et environnemental est une nouvelle fois central, le tableau étant entièrement réalisé en matériaux recyclés. Parallèlement, une des tendances du design en temps que motif est la rayure, verticale, horizontale ou même diagonale.

Bref, Tour Eiffel traduit un désir de vitalité et d'optimisme qui s'est traduit à Paris en 2024 avec les Jeux Olympiques. Nombre d'épreuves avaient d'ailleurs lieu au pied de ce monument emblématique de Paris.

 

Tour Eiffel

14X19 cm

peinture sur bois/ardoise

décembre 2024

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Coq et poule de Gournay

REALISATION D'UNE PLAQUE COMMEMORATIVE DE JUMELAGE ENTRE GOURNAY ET REMSHALDEN

Réalisation de la plaque commémorative de jumelage entre Gournay en Bray et Remshalden (Allemagne)  reprenant deux symboles de la ville : le cinéma Le Kursaal et une poule et un coq de Gournay, plumage noir piqueté de blanc en relief. Elle sera officiellement installée en Allemagne début décembre.

 

Coq et poule de Gournay

30X80 cm

brique/zinc/ardoise

novembre 2024

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QUAND ARTS PLASTIQUES ET PHOTOGRAPHIE NE FONT PLUS QU'UN

Heure dorée 3 fait partie d’une série de trois tableaux sur le même sujet de même dimension, seul le cadre d’ardoise et la couleur du sujet central, rouge, vert ou bleu changent.

Une double inspiration a guidé mon travail, la rencontre avec une céramiste, Patricia Lemort, et la participation à un atelier photo au foyer rural de Savignies sur le thème de l’heure dorée.

Patricia Lemort, a eu plusieurs ateliers dans la région, d’abord à Gouvieux, puis à saint Samson la Poterie dans l’usine de carreaux des frères Algrave et enfin au Coudray saint Germer. Patricia Lemort, devant déménager en Bretagne, a cherché à se débarrasser des chutes et ratés de plaques de céramique qu’elle a réalisé dans le cadre d’une résidence d’artistes pour la communauté de communes du Pays de Bray. Ces plaques de céramique, sur lesquelles ont été gravées des empreintes d’engrenages, de petits animaux type escargots ou de feuilles, ont servi à réaliser une installation exposée à partir de 2022 à La Chapelle aux Pots le long de la voie verte. Je suis allé chercher ces chutes dans son ancien atelier à saint Samson la Poterie. Ce qui m’intéressait était justement d’introduire de la couleur dans mon travail, plutôt terreux jusqu’alors, et de travailler un nouveau matériau, la céramique, matériau fortement ancré dans l’histoire patrimoniale locale.

 Depuis lors, je me suis rendu compte cet été que l’installation de Patricia Lemort avait été enlevée définitivement ou non, je n’ai pas d’information à ce sujet. Il n’en demeure pas moins que ce qui reste du travail de Patricia Lemort, ce sont les chutes, ratés, déchets, que j’ai incorporé dans mes sculptures et tableaux. Je trouve cela assez émouvant et s’inscrit bien dans mon travail sur la résilience.

 Heure dorée 3 est bien une œuvre faite à quatre mains, Patricia Lemort ayant fait le fond et moi-même la composition et les collages d’ardoise et de tuile vernissée apposés sur la plaque. Patricia Lemort n’a pas été associée à ce travail étant déjà partie en Bretagne.

La seconde source d’inspiration est un travail réalisé dans le cadre d’un atelier photo sur le thème de l’heure dorée, bien connu des photographes. C’est une heure particulière de la journée avant le coucher de soleil où la lumière diffuse aux paysages une couleur dorée à la fois pleine d’énergie et de douceur. Elle s’oppose à l’heure qui suit, dite « heure bleue » aux couleurs plus froides.

 J’ai cherché à transformer ce thème en format tableau avec mes techniques d’assemblage et de collage mais en voulant rappeler que l’origine du processus créatif est une démarche photographique. J’ai utilisé pour cela les plaques de céramique de Patricia Lemort portant les empreintes d’engrenage pour représenter le soleil rayonnant, des équerres d’ardoise que j’ai découpé à la disqueuse, pour représenter le cadrage du photographe et un morceau de tuile vernissée au centre de l’ardoise pour représenter le sujet, objet de la photo.

Techniquement, cette série se différencie également du reste de ma production du fait qu’il n’y a pas de cadre en ardoise qui entoure le motif principal, présentation qui est un peu ma marque de fabrique. Le cadre se trouve en fait dans le sujet, un cadre extérieur n’aurait donc rien rajouté.

 

Heure dorée 3

20X23 cm

 Céramique/tuile vernissée/ardoise

 2022

Heure dorée 3